vendredi 16 février 2007

À Mouffetard, il s’écroula.

La tempête s'intensifiait et le vent s’engouffrait avec violence, non seulement dans les rues mais aussi sous le timide gilet d’Alexandre. Oppressé par des forces beaucoup plus puissantes que celle auxquelles il n’avait jamais fait face, il luttait avec acharnement. Mais, aussi décidé puisse-t-il être, son souffle se faisait court et ses yeux, injectés de la rage et de l’effort, commençaient à ne plus distinguer les formes à travers l’épaisse toison de neige qui s’acharnait sur la ville.

La poitrine d’Alexandre se serrait alors que sa peau entière sombrait sous la torture des fouets d’Éole. Impossible de faire une pause, l’effort consentis fusse-t-il louable : la rue des Gobelins n’était pas encore en vue.

La force invisible qui courbait le dos d’Alexandre finit par l’emporter sur l’effort du désespéré : à Mouffetard, il s’écroula. Couché, à plat ventre, dans la neige, Alexandre se sentit envahi d’un plaisir coupable : le confort relatif de son berceau jumelé au repos tant mérité lui firent prendre conscience que tout avait été vain. Le métro, s’il le rejoignait, l’emmènerait à une autre station, où il galèrerait toujours plus pour sortir vivant – peut-être – et se réfugier quelques instants dans une pièce froide, aussi chauffée soit-elle. Alors qu’il pesait le pour et le contre, la neige continuait à s’abattre sur son dos. Un centimètre, deux centimètres… puis ce furent 15 centimètres qui s’accumulèrent avant qu’Alexandre ne se décide à pousser son dernier souffle, se disant, au fond de lui-même, qu’au fond, quoi qu’il fasse, le Québec le rattraperait.

dimanche 4 février 2007

Tag

[note à moi même: On m'a demandé de dire 5 vérités sur moi. Puisque j'adore les petites énigmes facilement résolues et que, malgré tout ce que puisse dire, j'adore faire des rimes (même si elles n'ont rien de poétiques) j'ai décidé de sublimer mes pulsions là dessus... Clever, clever, clever...]

1.
Sur les murs blancs
Où poussent les araignées
Résonnent les chuchotements
De ses fragiles pensées

2.
Dans l’antre de la bête
Le sifflement constant
Des machines de son temps
Qui seules, le font renaître

3.
Les touches nacres et charbons
Le nickel fièrement tendu
Se retiennent sans un son
Depuis qu’il n’en joue plus

4.
Dans son univers d’Éveillé
Il n’est qu’un petit garçon
Et tout est comptine, chanson
Et grande timidité

5.
Où qu’il aille, quoi qu’il fasse
En lui ne peut faire taire
Qu’à côté de lui, à cette place,
Un vide le rende doublement solitaire


Tag:
La chaine doit s'arrêter
Devant l'évidence
Qu'il connaisse l'absence
D'une personne à emmerder.

[Cela dit il invite
Qui serait écoeuré
De ces vers sans papiers
et de cette pudeur nuvite
à aller visiter l'autre]

Février stuprò suo 4

Les pensées qui le submergeaient ne lui apportaient jamais le moindre réconfort. Elles l’isolaient plutôt insidieusement, le perdant dans un bois d’où il ne pourrait plus jamais s’échapper. Quoi qu’il puisse parfois courir à en perdre haleine, cherchant tantôt la lumière tantôt les voix, il n’atteignait rarement que l’orée, avant de se perdre à nouveau sur les sentiers sinueux où ses pensées l’entrainaient.

L’espoir de retrouver la sortie de ce sombre labyrinthe, où la cime des arbres si haute soit elle ne l’aidait jamais à s’orienter, s’amenuisait de jours en jours. Et à quoi bon, se disait-il. Certes, il voyait bien les mains tendues, les lampes torches de ces adjuvants qui cherchaient – certains en y mettant bien un peu d’effort – à le guider vers un bois plus clairsemé, mais leurs appels lointains avaient de moins en moins d’attrait. Peut-être serait-il plus simple d’abandonner.

Les glapissements lointains des coyotes (ou était-ce une meute de loup?), entendus quelques temps auparavant lui avait d’abord parus menaçants. L’idée d’affronter seul ces bêtes était, comme le sens commun le voulait, pour le moins terrifiante. Mais très vite, les jours passant, leurs aboiements s’étaient lentement mutés en un indescriptible réconfort, comme si la venue hypothétique de ces chiens sauvages entamerait le voyage de retour vers les heureuses contrées. Hélas, de plus en plus lointains s’étaient faits les échos, à un point tel qu’il avait du se résigner à ne jamais pouvoir entendre les grognements salvateurs des canins affamés.

L’épais feuillage et les branches charnues se refermaient sur lui. Théâtralement, las de courir en vain, las d’espérer l’impossible, il s’était couché nu, replié sur lui-même, à même le sol. Et le temps passait, passait, passait.